Tricoté serré

Tricoté serré

Par Aline Pinxteren, rédactrice en chef

Crédit photo: Laurence Labat; maquillage-coiffure: Sylvy Plourde.

C’était la nuit de mon anniversaire, mon chum, mes fils, mes proches, tout le monde dormait déjà ici au Québec... J’étais seule. Seule avec la peur qui montait, seule avec la douleur qui grandissait et que la morphine injectée parvenait à peine à calmer. Les minutes s’écoulaient, bien trop lentement...

Puis, vers 2 h du matin, mon téléphone s’est animé. Avec les six heures d’avance du décalage horaire, deux grandes amies belges, à peine levées, m’envoyaient leurs voeux. Quand elles ont compris où je me trouvais, elles m’ont soutenue à coups de messages tellement drôles qu’une heure et demie plus tard, quand on est venu me chercher pour m’emmener en salle d’op, je n’arrêtais plus de sourire. Ces deux amies très chères étaient là aussi, assises juste derrière moi, aux funérailles de mon père, là le jour de mon mariage toute jeune, là avec des fleurs à la naissance de mes enfants. Présentes depuis trente ans, tant pour partager un verre de vin que pour garder les grands secrets.

Mon anniversaire approche, et mes ennuis de santé sont derrière moi. Mais je n’oublie pas. Qu’on les connaisse depuis nos quatre ans, par nos maisons voisines au village, ou depuis beaucoup moins longtemps, au détour des lunchs dans la cuisine et des partys du bureau, les vrais amis se comptent sur les doigts d’une main. Voire sur ceux des deux si on est vraiment chanceux. Mais ces liens, ça se cultive, ça s’entretient...

Quand les enfants arrivent, que la carrière se construit, on perd parfois le fil, faute de temps. Quand le grand amour disparaît trop vite, on se retrouve parfois sans beaucoup d’amis, on était si bien juste à deux tout ce temps... Et quand l’heure de la retraite sonne, les collègues proches s’éloignent souvent aussi, vu que nos intérêts ne sont plus vraiment pareils.

D’autres amitiés se nouent alors. Dans un cours de yoga, pendant une croisière, lors d’une activité du quartier. Sur Internet également. De plus en plus de sites permettent de tisser des relations. À lebelage.ca, dans les espaces de discussion sous certains articles, au sujet de la perte de son conjoint, des familles toxiques ou de la solitude au moment des Fêtes, par exemple, des lecteurs en soutiennent d’autres, échangent leurs expériences ou déposent leur souffrance. Moins vraies, ces amitiés virtuelles? Peut-être... Mais elles débouchent souvent sur des rencontres réelles, permettant aux plus isolés et aux moins mobiles de continuer à compter aux yeux des autres, à se confier, à écouter, à aider.

Selon une étude américaine récente, plus notre vie sociale est riche, meilleure sera notre santé à long terme, l’isolement relationnel favorisant entre autres l’hypertension et l’obésité. Une bonne raison d’inviter sans tarder ces connaissances qu’on se promet toujours de revoir! À force de jaser, de rire et de refaire le monde ensemble, on va se sentir tellement en forme qu’on finira tous centenaires dans la même résidence, à partager comme avant un bon verre de vin au jardin. Plutôt tentant comme programme, non? Amis pour la vie!

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Aline Pinxteren, rédactrice en chef

aline.pinxteren@lebelage.ca

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