Vacances à temps partagé : Ce que vous devez savoir

Vacances à temps partagé : Ce que vous devez savoir

Par Sophie Stival

Crédit photo: iStock Photo

Les promoteurs de vacances à temps partagé n’ont pas bonne presse ces dernières années, que leurs bureaux soient au Québec, aux États-Unis, en Europe ou dans certains pays d’Amérique latine. Et comme leurs stratégies de vente et les formules proposées sont aussi diversifiées que leurs nationalités, il faut bien se renseigner. Un cas de figure parmi d’autres? Après avoir inscrit vos coordonnées sur un coupon de tirage pour un voyage dans une boutique, un restaurant ou un salon, vous recevez un appel vous annonçant que vous avez remporté un prix… Mais pour vous en prévaloir, vous devez assister à une séance d’information. Une fois à la séance, des représentants vous vanteront avec aplomb les attraits des vacances à temps partagé, en vous montrant des photos de lieux de villégiature paradisiaques pour vous vendre l’utilisation d’une unité d’hébergement. L’objectif ultime: vous faire signer le jour même un contrat qui vous engagera pour des années, voire des décennies, à payer divers frais en plus d’une mise de fonds de plusieurs milliers de dollars. 

De récents jugements rendus par la Cour des petites créances ont annulé certains de ces contrats de vacances à temps partagé signés sous pression, les victimes disant n’y avoir pas consenti de façon éclairée, volontaire et réfléchie. Mais attention, il faut pour cela fournir des preuves suffisantes, en démontrant, par exemple, que des faits ont été cachés. De nombreux consommateurs restent donc pris avec leur contrat pour de longues années.

Partout dans le monde

En 2013, Yolande Noël et Michel Di Tomasso ont signé une entente d’une durée illimitée avec la célèbre chaîne d’hôtels Hilton (Hilton Grand Vacations). Ils ont acheté une parcelle d’un immeuble à logements luxueux à Las Vegas. Il s’agissait d’un logement avec deux chambres à coucher, qu’ils pouvaient utiliser une semaine par année. Avant de parapher le contrat, les deux conjoints, alors âgés respectivement de 68 et 70 ans, ont assisté à des réunions au Mexique et se sont renseignés longuement sur la formule de vacances à temps partagé. «J’ai toujours aimé le Hilton, alors on n’a pas hésité avant d’accepter leur offre de passer deux nuitées payées à Las Vegas en échange de notre présence à une rencontre d’information. Cette ville m’intéressait particulièrement, car les frais d’entretien futurs seraient liés durant toute la durée du contrat au lieu d’origine. Ce n’était pas le Mexique, ni un bord de mer. Las Vegas est une ville de jeux de hasard et elle existera toujours dans 50 ans. En plus, c’est au Nevada, où le climat sec n’endommage pas les logements», explique Michel Di Tomasso. 

Le couple a déboursé à la signature du contrat un montant de 25 990 dollars américains, en s’engageant aussi à payer des frais d’entretien annuels de 913 $, indexés selon divers critères. «En signant, je savais que les probabilités de récupérer la mise de fonds pour moi et même pour ma descendance étaient faibles. Il faut donc avoir les sous et la santé pour le faire. Aujourd’hui, on voyage plusieurs fois par année partout dans le monde où Hilton a des appartements-hôtels ou des ententes avec des partenaires. Ce sont des logements très beaux et bien situés.» Précisons que Yolande et Michel ont accès avec ce contrat au réseau RCI, qui permet d’échanger leur hébergement de Las Vegas contre d’autres séjours et propriétés partout dans le monde. Ainsi, leur semaine dans un logement avec deux chambres à coucher peut être troquée contre deux semaines dans un logement plus petit d’une chambre à coucher, voire même plus longtemps s’il s’agit d’un studio.  

Mais chaque promoteur a ses façons de faire. Dans le cas présent, il est question d’échange de points, et certains endroits sont plus convoités que d’autres. «On attend toujours d’aller dans un château en Toscane, mais la demande est forte. C’est parfois plus difficile en haute saison. On a déjà visité la Nouvelle-Zélande et on part bientôt pour l’Écosse», confie Yolande Noël. 

Pas vraiment propriétaire

Certaines transactions de vacances à temps partagé seront beaucoup moins dispendieuses, mais avec des termes contractuels plus stricts: on peut, par exemple, être contraint de voyager au même endroit chaque année ou à certaines périodes précises. La basse saison étant moins recherchée, elle coûte généralement moins cher. Certains contrats exigent l’achat de points échangeables contre des séjours. D’autres permettent d’échanger son hébergement contre un autre, ailleurs dans la province, au pays ou dans le monde. Plusieurs ententes subséquentes peuvent aussi être prises et entraîner d’autres frais. Avant de signer quoi que ce soit, on lit donc bien son contrat.

Comme il existe plusieurs types de contrats, dont certains comportent de nombreuses pages, l’Office de la protection du consommateur (OPC) recommande la prudence. «La formule des vacances à temps partagé se présente habituellement sous la forme d’un simple droit d’usage. Ce droit ne fait pas de vous un propriétaire. Il s’agit plus d’une location à très long terme que vous payez à l’avance», explique Charles Tanguay, porte-parole de l’OPC. Bien que la Loi sur la protection du consommateur interdise les pratiques commerciales déloyales, le contenu du contrat relève uniquement de la libre négociation entre vous et le promoteur. Et une fois le contrat signé, la loi ne vous accorde aucun délai pour y mettre fin, sauf exception.

Quels frais?

«En premier lieu, pour savoir avec qui on fait affaire, on vérifie le nom de la personne et de l’entreprise sur Internet. Si on vous invite à un souper ou une soirée et qu’on insiste pour que vous signiez la même journée, cela doit inciter à la méfiance. Si on ne vous laisse pas le temps de réfléchir, sauvez-vous! Ces gens sont payés à commission et font de la vente à pression, souligne Me Yves Papineau, avocat spécialisé en droit de la copropriété. Dans la mesure du possible, on traite avec une entreprise responsable et reconnue, idéalement située au Québec afin d’avoir la possibilité de poursuivre en cas de litige.

On n’hésite pas non plus à poser beaucoup de questions. Il y a une mise de fonds initiale, mais quels sont les frais annuels d’entretien? Sont-ils indexés et comment? Et les autres frais (administration, réservation, repas obligatoires)? Quelle est la durée du contrat et quelles sont les pénalités si on veut l’annuler? Négociez le prix de votre transaction, tout en comprenant bien de quel type de logement il s’agit et quelle semaine de l’année vous est dévolue. D’ailleurs, mieux vaut toujours demander un avis légal avant de signer le contrat.

Plusieurs transactions peuvent s’avérer avantageuses. «Une de mes clientes à la retraite est très satisfaite de son entente à temps partagé, poursuit le juriste. Elle a acheté une semaine en copropriété dans la région de Tremblant, qu’elle échange pour voyager ailleurs. Comme elle est très flexible, cela lui permet de magasiner l’endroit de ses vacances. Elle a déjà logé une semaine dans un penthouse d’une tour à logements au Texas par exemple, en trouvant un vol au rabais et une voiture de location pour 350 $ tout compris.»

Annuler son contrat

Une fois l’engagement signé, il est difficile de mettre fin à son contrat de vacances à temps partagé, d’autant que les promoteurs rachètent rarement leurs contrats. Trouver une tierce partie intéressée n’a rien de simple. Dans certains cas, les contrats prévoient des clauses d’annulation avec des pénalités financières, mais cela ne constitue pas la norme. Que survient-il si vous signez un contrat à l’étranger et qu’au bout d’un certain temps, vous ne souhaitez plus payer les frais d’entretien annuels? Selon Me Papineau, les risques de poursuite ne sont pas aussi élevés qu’on pourrait le croire. «Avant de poursuivre un consommateur, le promoteur étranger devra prouver qu’il a tenté de minimiser ses dommages en remettant en vente les semaines en question. De son côté, le consommateur devra aussi essayer de faire la même chose.» En d’autres mots, on ne peut simplement affirmer qu’on a subi un préjudice sans pouvoir attester qu’on a fait un effort pour l’éviter. «Certains promoteurs seront contents d’avoir vidé vos poches avec un gros paiement initial, indique Me Papineau. Si vous cessez de payer, on vous enverra un avis de non-paiement et on vous avertira que si vous ne payez plus, votre contrat sera résilié. Cela leur permet ensuite de revendre votre semaine à d’autres.» Vous aurez cependant perdu votre mise de fonds, ce qui mérite réflexion.

Avant de vous engager  

  • Effectuez une recherche sur Internet avec le nom du vendeur et de l’entreprise. Choisissez un promoteur reconnu et responsable.
  • Posez des questions, notamment sur les frais initiaux, annuels ou autres. 
  • Demandez quelle est la durée du contrat et quelles sont les pénalités si vous souhaitez le résilier. 
  • Négociez le prix en fonction du type d’immeuble et de logement, de son emplacement et de la période choisie.
  • Vérifiez si vous pouvez échanger vos semaines, s’il y a un système de points, etc.
  • Ne signez rien le premier jour. Demandez plutôt une copie du contrat et obtenez un avis juridique. L’OPC rappelle que vous devez bien comprendre vos obligations futures, les risques possibles de votre engagement, ainsi que vos droits et obligations.

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