Je m’achète une auto ou non?

Je m’achète une auto ou non?

Par Jean-François Savoie

Crédit photo: Erik Mclean via Unsplash

Par les temps qui courent, devrait-on se laisser tenter par une voiture flambant neuve? Tour de piste pour une décision éclairée.

L’automne est habituellement un bon moment pour changer sa voiture. C’est là que les concessionnaires, dans le but d’écouler les modèles de l’année précédente, attirent les clients avec des offres alléchantes. La situation est toutefois différente cette année en raison de la pandémie. Les usines ayant temporairement cessé leurs activités, l’industrie automobile a connu d’importantes pertes d’argent. Les concessionnaires ont vu leur inventaire rétrécir. À l’heure actuelle, les remises que ces derniers offrent à leurs clients sont bonnes, mais pas exceptionnelles, souligne George Iny, président de l’Association pour la protection des automobilistes (APA). «Il y a des carences dans l’inventaire des modèles les plus populaires, comme les VUS et les compactes.»

Les acheteurs au rendez-vous

Au cours de l’été, les clients ont néanmoins recommencé à fréquenter les concessionnaires. Selon le rapport de Desrosiers Automotive Reports, les ventes de véhicules légers en juillet ont pratiquement rattrapé celles des deux années précédentes. Selon l’APA, une grande majorité des acheteurs ne semblent pas touchés par l’incertitude économique actuelle. Il y aurait toutefois une recrudescence de demande de voitures d’occasion à petits prix chez ceux qui ont perdu leur emploi et ne peuvent assumer de frais élevés de réparation de leur vieille voiture, ainsi que chez les travailleurs qui craignent d’attraper le coronavirus dans les transports en commun (le nombre de Canadiens qui vont au travail en autobus, en train ou en métro a chuté de 13 % à 3 % en raison de la pandémie*).

 

Des concessions à faire

Qu’en est-il des taux d’intérêt chez les concessionnaires? Selon Robert Poéti, président de la Corporation des concessionnaires du Québec, ils n’ont jamais été aussi bas. Le moment propice pour s’approprier un véhicule équipé sur le plan sécuritaire. «De plus en plus de technologies dans les véhicules facilitent et aident la conduite.» Autant en profiter! Un modèle nous tente? Malgré les inventaires limités, on peut trouver notre compte. «Si on convoite un modèle que tout le monde veut, il n’y aura pas de rabais, met en garde Julien Amado, journaliste automobile du Guide de l’auto. Par contre, si on va du côté des catégories moins en demande, comme la berline intermédiaire, il y aura peut-être plus de jeu dans la négociation. En achetant un modèle moins populaire, il faut cependant le garder plus longtemps pour que ça vaille la peine, et qu’on perde ainsi moins d’argent lors du prochain échange.» On y tient? Mieux vaut alors réserver le plus tôt possible. Les sites automobiles ainsi que les publications du Guide de l’auto, de l’Annuel de l’automobile et de Protégez-vous seront très utiles pour s’y retrouver dans le grand chamboulement des sorties retardées ou non des nouveaux modèles. 

Des prix gonflés à l’hélium

Certains concessionnaires pourraient tenter, parfois par l’entremise d’une vente privée, de nous convaincre d’échanger notre voiture pour un modèle plus récent. Dans ce cas, gare à la «balloune», un mode de financement illégal dont la pratique est malheureusement répandue au Canada selon une enquête menée par l’APA au Québec, en Ontario et en Colombie-Britannique. En gros, cela consiste à intégrer ni vu ni connu soit le solde impayé de notre ancienne auto, soit des frais administratifs importants, ou encore à faire miroiter la promesse d’un paiement mensuel peu élevé à l’achat d’une auto neuve. «Si on nous suggère de mettre fin à une location ou à un financement sous prétexte que la demande est très forte pour le modèle et la couleur que l’on convoite, il y a de fortes chances qu’une balloune nous soit refilée sur le prix de notre prochain véhicule, sans qu’on la voie passer puisqu’elle fera partie de nos paiements d’une façon ou d’une autre», explique George Iny. 

Certains concessionnaires cacheront dans nos nouveaux paiements des frais qui n’apparaîtront pas sur la facture. Par exemple, en refilant les pénalités d’un retour hâtif d’une location dans le financement de l’achat d’un nouveau véhicule. En revanche, les règles sont différentes pour une location à long terme. 

Pour y voir clair, il faut faire une distinction entre la dette et le paiement, entre le prix total d’un véhicule et le financement octroyé pour l’achat. Peut-être que des paiements mensuels de 300 $ font notre affaire, mais sur combien de mois seront-ils étalés? Veut-on payer pendant sept ans, ce qui revient plus cher que le prix de vente réel? «S’il reste trois ou quatre ans à payer sur le véhicule qu’on échange contre un neuf et qu’on sort du concessionnaire avec le même paiement sur sept ans, notre dette devient beaucoup plus importante», relève George Iny. Bref, mieux vaut se méfier et prendre notre temps avant de décider.

La voiture électrique: ça nous branche?

Avant même la situation actuelle, le succès mondial des voitures électriques (VÉ) de Tesla avait poussé le marché automobile à se tourner davantage vers la production de ces autos. Est-ce avantageux? Plusieurs arguments jouent en leur faveur: subventions à l’achat, beaux nouveaux modèles qui s’éloignent de l’ancien style OVNI, électricité québécoise au coût stable et peu élevé, autonomie prolongée (400 km et plus), loi zéro-émission, nombre grandissant de bornes rapides à travers la province, traversiers gratuits, voies réservées… et l’air pur d’un moteur sans pétrole. Mais est-ce le bon moment pour acheter une VÉ? «Absolument, répond Simon-Pierre Rioux, président fondateur de l’Association des véhicules électriques du Québec (AVEQ), les incitatifs sont toujours actifs avec les subventions du provincial et du fédéral, qui peuvent atteindre respectivement 8000 $ et 5000 $. Il faut en profiter pendant qu’ils sont encore disponibles, surtout pour le fédéral. Au provincial, nous sommes assurés que la subvention durera jusqu’en 2023 grâce à la loi zéro-émission, mais il ne s’agira pas nécessairement du plein montant, en fonction de la baisse du prix des VÉ pour rejoindre le prix des véhicules équivalents à essence et du nombre de ventes.»

Selon l’AVEQ, certains de ses membres à la retraite propriétaires d’un VÉ, qui représentent une bonne partie de l’association, affirment qu’il s’agira sans doute leur dernière auto, puisque ces voitures peuvent rouler entre 300 000 et 400 000 km avant que la batterie soit affectée, une performance qui surpasse celle des véhicules à essence. 

*Source: Statistique Canada.

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