Parents en crise: comment aider nos petits-enfants?

Parents en crise: comment aider nos petits-enfants?

Par Linda Priestley

Crédit photo: Nikoline Arns via Unsplash

Des tensions surgissent entre un de nos enfants et son conjoint? Marche à suivre pour aider nos petits-enfants concernés par ce conflit. 

 

Fragile, la vie familiale? Selon un bulletin récent publié par le ministère de la Famille*, le nombre de couples séparés ne cesse de croître. Et la présence d’enfants ne constitue pas un frein majeur à cette situation, indique la même recherche. Face aux conflits de leurs parents et aux sentiments que ça génère au sein du clan, nos petits-enfants ne savent souvent plus à quel saint se vouer. Quelles solutions peut-on y apporter en tant que grand-parent?

 

De la chicane dans la cabane 

Maman et papa s’ignorent ou se parlent sans douceur. Le ton monte et les discussions se multiplient et s’enveniment. Bref, l’air devient irrespirable dans la chaumière. L’enfant, fine mouche, détecte bien sûr ce refroidissement entre ses parents et en devient grandement affecté. «Ce genre de situation tend à faire augmenter le niveau de stress et d’anxiété chez le jeune», confirme Francine Ferland, ergothérapeute et auteure de livres sur le sujet. Son comportement risque aussi de changer: «Il aura tendance, par exemple, à devenir plus turbulent ou à refuser de respecter les consignes, à la maison ou à l’école.» Parce qu’il redoute une rupture éventuelle, l’enfant se tient sur le qui-vive: «Ça l’inquiète de penser que son père et sa mère ne seront plus ensemble, ni avec lui en tout temps.»

 

Le rôle des grands-parents Bien entendu, ayant toujours assuré une présence constante dans la vie de l’enfant, on endosse plus spontanément le rôle de confident quand la situation familiale tourne au vinaigre, souligne Francine Ferland. Si le jeune a besoin de s’épancher ou de se plaindre de la situation, on lui prête une oreille attentive. «Rien qu’en lui fournissant l’occasion de s’exprimer librement, on le soulage déjà d’un immense fardeau.» On le fait toutefois sans passer de commentaires ni donner notre avis: «En cas de conflit entre les deux parents, mieux vaut ne pas prendre parti pour l’un ou l’autre.»

En optant plutôt pour une neutralité bienveillante, on parvient à établir de meilleurs contacts avec notre petit-enfant qui, autrement, pourrait ne pas comprendre pourquoi on est du bord de maman ou de celui de papa. L’idéal est d’agir avec empathie et compassion, sans jugement. En lui disant des phrases du genre: «Je sais, ce n’est pas facile pour toi» ou «Je te comprends», on l’assure de notre soutien. Autre bonne tactique: lui changer les idées en proposant, par exemple, de sortir, de jouer ou de s’adonner à une activité qui nous plaît à tous les deux. Ou l’inviter à venir passer quelques jours chez nous, lui offrant ainsi un havre de tranquillité et de stabilité où il pourra se détendre et se sentir rassuré. «Quand l’enfant voit que tout va bien chez ses grands-parents, qu’ils sont toujours là pour lui, ça le réconforte.»

 

Pendant la séparation

Il s’agit de l’étape la plus anxiogène pour l’enfant, qui se trouve alors plongé dans l’inconnu. Que va-t-il arriver? De quelle façon son quotidien sera-t-il affecté? Avec qui va-t-il rester? Sera-t-il obligé de changer de quartier, d’école? de se faire de nouveaux amis? Son niveau de stress grimpe en flèche durant cette période délicate. Si la séparation ou le divorce se déroule à l’amiable, sans trop de heurts, la situation sera plus facile à vivre. Mais si la relation demeure tendue entre ses parents durant les procédures ou que des tensions importantes subsistent une fois qu’ils sont séparés, le jeune pourrait devenir très anxieux et vivre très mal la rupture.

 

Le rôle des grands-parents Dans le tourbillon des démarches menant à la séparation, l’enfant se sent déstabilisé et perdu. «Il est alors essentiel de maintenir une présence constante dans sa vie», soutient l’ergothérapeute. Si, par exemple, il a été convenu que notre petit-enfant habitera en alternance chez son père et sa mère, on pourrait proposer qu’il vienne séjourner chez nous pendant quelques jours, et ce, sur une base régulière. On contribue ainsi à renforcer son sentiment de sécurité et de stabilité. Par ailleurs, comme c’est facile pour lui de croire qu’il a une (petite ou grande) part de responsabilité dans la rupture de ses parents ou dans la discorde qui règne entre eux, on l’assure du contraire. «Il faut lui répéter que maman et papa ne se quittent pas à cause de lui, parce qu’il n’a pas été assez gentil ou obéissant. On lui affirme que ce sont des affaires de grandes personnes et qui n’ont rien à voir avec lui.»

 

Après le changement de vie

Une fois la poussière retombée et la routine bien rétablie, on respire un peu… pourvu, bien sûr, que les partenaires séparés aient trouvé un terrain d’entente et qu’ils maintiennent des liens cordiaux. S’ils persistent à se regarder en chiens de faïence, la situation risque d’empoisonner la vie du jeune, surtout si celui-ci habite une semaine chez l’un et une semaine chez l’autre. Du coup, il ne saura pas sur quel pied danser. «Il essaiera sans cesse de trouver des façons de se sentir bien aux deux endroits», observe Francine Ferland. 

 

Le rôle des grands-parents Peu importe la situation, l’organisation du quotidien de l’enfant devient un enjeu capital. Comme avant, le jeune a un grand besoin de stabilité. Même si son univers a basculé, on peut l’aider à ne pas perdre pied. «En l’invitant à séjourner à la maison, par exemple, on lui fait voir que c’est toujours pareil chez papi et mamie. Il sait alors qu’il peut compter sur cette constance.»

Par ailleurs, la façon dont l’enfant compose avec sa nouvelle réalité dépend de son âge et de sa situation. «Un enfant unique et d’âge préscolaire, par exemple, n’ayant personne avec qui partager ses émotions, pourrait se sentir seul et perdu. À l’inverse, un adolescent haussera peut-être les épaules, parce que certains de ses amis à l’école sont déjà passés par là.» En tout temps et peu importe la réaction de l’enfant, on peut accueillir ses confidences et l’accompagner.

 

* Quelle famille?, bulletin trimestriel sur les familles et les personnes qui les composent, Direction de la recherche, de l’évaluation et de la statistique du ministère de la Famille, été 2018.

 

À consulter: Grands-parents aujourd’hui – Plaisirs et pièges, de Francine Ferland (collection du CHU Saint-Justine pour les parents).

 

Mieux vaut éviter…

- D’ajouter son grain de sel. Comme on est souvent très émotif dans pareille situation, on s’abstient de tout commentaire, même si l’un ou l’autre des parents concernés nous demande notre avis. Mieux vaut l’encourager à solliciter le soutien d’une tierce personne neutre, comme un thérapeute ou un médiateur.

- De donner raison à l’enfant qui se plaint de ses parents. On ne l’accueille pas à bras ouverts pour le consoler en lui disant «Mon pauvre petit!» s’il a fait une bêtise ou «T’as raison, tes parents ne devraient pas se chicaner devant toi.»

- De faire la leçon à son enfant. Si on ne veut pas se faire rabrouer ou gâcher notre relation avec lui, mieux vaut garder pour soi des petites phrases du genre: «À ta place, je n’aurais pas fait ça!»

- D’être mauvaise langue. On s’abstient de médire d’un parent devant son enfant ou de casser du sucre sur le dos de l’ex de notre fils ou de notre fille. Et on ne porte pas de jugement sur les parents devant nos petits-enfants.

- De demander à l’enfant de jouer les porte-paniers. On ne le questionne pas, par exemple, sur sa vie chez papa ou à propos du nouveau copain de maman. Ça risque de se savoir et de se retourner contre nous.

- De manquer de discrétion. Si le jeune nous fait des confidences, c’est motus et bouche cousue! Si on les répète à ses parents et qu’il l’apprend, il se sentira trahi et ne nous dira plus rien. Cela dit, lorsque ses confidences laissent supposer que sa sécurité est menacée, on sonne bien sûr l’alarme auprès des parents.

 

- D’outrepasser notre rôle de grand-parent. Par exemple, on ne décide pas à la place des parents d’envoyer notre petit-enfant en consultation. On l’écoute, on compatit avec lui, on le redirige au besoin vers ses géniteurs. S’il préfère, par contre, ne pas recourir à un soutien extérieur malgré les recommandations de papa et maman, on peut, dans ce cas, lui faire valoir les bienfaits d’une telle intervention et, si on réussit à le convaincre, l’assister dans ses recherches pour trouver l’aide appropriée. Toujours en tenant compte de l’avis des parents, bien entendu.

 

 

Je fais mon budget beauté

Entre nous

Le billet de Linda Priestley, Rédactrice en chef

L’apologie de l’entraide

Vidéos